samedi 25 avril 2009

Le maître-mot : subsidiarité

Avant de faire progresser le débat sur le fond des sujets, il me faut répondre à Sof qui n’a pas tout à fait saisi le sens de ma critique sur le Manifesto. Je reconnais que produire un document commun entre les 27 partis socialistes européens est un effort louable, dont le PPE va probablement s’inspirer la semaine prochaine à Varsovie. Mais on ne peut pas en rester au « c’est toujours mieux que rien » avec un texte qui refuse de faire des choix clairs.

Pour illustrer mon propos, je reprendrais l'extrait suivant « La Banque Centrale Européenne doit soutenir la croissance et l’emploi tout en préservant la stabilité des prix ». En effet, d’une part les députés européens n’ont pas de compétence propre vis-à-vis de la Banque Centrale (rendue indépendante par les précédents traités) et d’autre part on lui demande ainsi de poursuivre deux objectifs qui sont – à court terme tout du moins – contradictoires alors qu’elle ne dispose pratiquement que d’un seul instrument : sa politique de taux. On a donc le parfait exemple d’une déclaration d’intention qui est contradictoire. La question que je me pose est la suivante : mieux vaut-il écrire cela ou ne rien écrire du tout ?

Ma critique sur le fond est donc la suivante : face à un Manifesto qui reste dans le flou et qui ne fait donc pas réellement de la politique, l’UMP s’appuie sur une expérience dont tout le monde a été témoin et qui a réellement remis la politique au centre du jeu européen : la Présidence Française de l’Union. On ne peut donc pas dire comme le fait Sof que d’un côté il n’y a pas grand-chose (le PSE) et que de l’autre côté il n’y aurait rien (le PPE) et qu’il faudrait donc se résigner au pas grand-chose. Je lui oppose donc, en quelques sorte, cette autre citation de Talleyrand : « Les hommes sont comme les statues : il faut les voir en place ». La principale différence entre l’UMP et le PS sur le plan européen, c’est que l’on a vu l’UMP, à travers le Président de la République, « en place » pendant six mois. De plus, il serait injuste de laisser penser que l’UMP est totalement muette pendant cette campagne, les interventions dans la presse de Michel Barnier ou de Bruno Le Maire (pas candidat mais ministre délégué aux Affaires Européennes) sont fréquentes et vont au fond des sujets.

Cette clarification étant faite, allons plus loin dans le débat en rebondissant sur le principe de subsidiarité, mis en avant par Sof. Ce principe doit effectivement être au cœur de la construction européenne. La position de l’UMP et du PPE est claire à ce sujet : par défaut, l’échelon pertinent est celui de la Nation, chaque transfert de compétence au niveau européen doit donc être motivé par une valeur ajoutée ou un effet d’échelle (il en va de même d’ailleurs pour les transferts de compétences vers les collectivités locales). Les sujets sur lesquels l’Europe doit donc « faire de la politique » sont ceux où une taille critique est nécessaire : monnaie, défense, diplomatie, environnement, politique commerciale, marché commun, régulation économique, politique industrielle et de recherche. Si l’on reprend les six têtes de chapitre du Manifesto, on se rend compte que les choses ne sont pas si claires pour le PSE.

Il y a tout d’abord quatre chapitres totalement en ligne avec ce principe de subsidiarité : « Relancer l’économie et éviter le retour des crises financières », « Mettre l’Europe en tête dans la lutte contre le changement climatique », « Donner à l’Europe une politique d’immigration pour le progrès » et « Faire de l’Europe un partenaire fort pour la paix ». Cela ne vous rappelle rien ? C’est très précisément le bilan principal de la Présidence Française, qui a proposé des plans de relance ainsi que l’organisation du G20, qui a fait passer le paquet Energie-Climat, qui a obtenu un consensus sur la politique d’immigration en Europe et qui a œuvré, au Caucase, pour éviter la guerre. Le Manifesto traduit donc, en mots, ce que Nicolas Sarkozy a fait en actes !

Un autre chapitre est « Parvenir à l’égalité des sexes en Europe ». Ce sujet me semble précisément ne pas relever du principe de subsidiarité. En quoi l’échelon européen est-il en l’espèce plus pertinent que l’échelon national ?

Le chapitre le plus intéressant, et qui nourrira certainement le débat entre Sof et moi durant cette campagne concerne l’Europe sociale. Sur ce sujet, ainsi que sur certains points de politique économique, il existe des clivages entre le PPE et le PSE. Au fond, il y a un doute pour savoir de quel échelon dépendent principalement ces politiques. Si l’on reprend la proposition mise en avant par Sof de salaire minimum européen, on voit bien que le mettre trop bas serait dangereux pour les pays les plus développés (moins-disant social par rapport a la situation actuelle) et que le mettre trop haut fragiliserait considérablement le développement des pays de l’Europe de l’Est. Il s’agit donc selon moi de l’exemple même de la fausse bonne idée : on n’a pas eu besoin de salaire minimum commun pour que l’Espagne et le Portugal rattrapent notre niveau de vie. Quoi qu’il en soit, l’Europe sociale doit être un vrai sujet de débat au cours de cette campagne, cela changera des habituels débats institutionnels qui ont endormi l'opinion publique européenne ces dernières années.

1 commentaire:

  1. Je pensais que la difference entre la Fed et la BCE etait justement le point que tu decris: la croissance et l emploi dans les objectifs pour la Fed et pas pour la BCE. Un changement de ce type n est pas sans consequences, cela aurait change enormement la politique de la BCE ces derniers temps. Apres, savoir si c est bon ou mauvais, dur a dire, mais au moins on peut facilement argumenter que ce n est pas une proposition sans importance

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